L’annonce des situations critiques

Dans le cadre des Débats de l’ASP, l’ASP fondatrice a organisé le mardi 21 février 2017 une rencontre sur L’annonce de situations critiques.

Les intervenantes étaient deux infirmières : Sophie Vickers, infirmière à l’hôpital Ambroise Paré à Boulogne et Marion Broucke est infirmière à l’Unité de Soins palliatifs de l’hôpital Paul Brousse.

Sophie Vickers, infirmière à l’hôpital Ambroise Paré à Boulogne, est venue parler de son rôle « d’infirmière d’annonce ». Cette fonction a été créée en application de la mesure 40 du Plan Cancer 2003-2007 qui imposait la mise en place d’un « dispositif d’annonce », après les Etats généraux du cancer qui avait montré à quel point ce temps dramatique de l’annonce d’une maladie grave était négligé par les médecins et très mal vécu par les malades et leurs proches. Depuis 18 mois, cette infirmière reçoit les patients de pneumologie, de dermatologie, de chirurgie digestive après que le médecin, seul, ait fait l’annonce du diagnostic. Elle prend le temps d’entendre ce qu’ils ont compris, de le reformuler, de leur expliquer la complexité du parcours de soins qu’ils vont suivre, de leur faire exprimer leurs besoins et devient la personne ressource qu’ils pourront appeler ou revoir lorsqu’ils rencontreront une difficulté imprévue. Elle est le lien entre tous les intervenants auprès de la personne malade, tentant de mettre cohérence et humanité dans un système souvent déshumanisé. Elle assure simultanément le soutien des proches angoissés. Sophie a suivi plusieurs formations pour faire ce travail si important, dans lequel elle s’est totalement engagée et qu’elle pratique avec un dévouement admirable. Mais l’hôpital, aveugle à la charge de responsabilité de cette fonction nouvelle et essentielle pour le malade et ses proches, ne lui offre aucun espace de partage pour la soutenir.

Marion Broucke est infirmière à l’Unité de Soins palliatifs de l’hôpital Paul Brousse. Son investissement auprès des malades en fin de vie l’a poussée à poursuivre des études et elle fait actuellement un travail de recherche sur la participation des familles à la toilette mortuaire. En USP, la première annonce est l’accueil, beaucoup de patients arrivant sans être clairement informés qu’ils vont en soins palliatifs. Tout le séjour, jusqu’au décès, est jalonné d’annonces difficiles, auxquelles participent tous les membres de l’équipe. Les situations sont évaluées et discutées quotidiennement en réunions, les soins comme les entretiens se font le plus souvent en binôme, et le langage est commun dans un souci de cohérence. L’information et le soutien des proches est un temps essentiel, en s’adaptant au rythme et aux limites de chacun. Parler de la mort avec les enfants et les écouter, oser ouvrir une possibilité de parler avec la famille du temps à venir, du moment de la mort et de l’après peut être d’un grand soulagement pour ceux qui n’osaient pas l’évoquer, trop centrés sur le mourant pour s’autoriser à dire leur propre souffrance. Ce travail relationnel d’ajustement constant à ce que vit l’autre, très fort émotionnellement, est rendu possible par de vrais temps de partage et d’échanges entre professionnels, une confiance réciproque et un sentiment d’équipe solide et soutenante.

Le public très intéressé et admiratif de la force de l’engagement de ces jeunes soignantes a poursuivi la réflexion e posant de nombreuses questions.